Hollande et Aubry, directs mais corrects
Une maire de Lille plus offensive, un député de Corrèze plus rassembleur, les deux finalistes de la primaire du PS se sont affrontés hier sur France 2.
Ça commence fort. François Hollande : «Je connais Martine depuis longtemps.» «Je n’étais pas sur tes genoux», corrige Martine Aubry. David Pujadas vient de leur demander si les deux finalistes de la primaire se détestent autant que la presse l’écrit. La maire de Lille reconnaît des relations «amicales et franches». Et Hollande préfère parler de respect «en ce qui [le] concerne».
Elus à l’Elysée, ils pourraient donc nommer l’autre à Matignon, s’enquiert, perfidement, David Pujadas ? «Je pense qu’il faut un Premier ministre plus jeune que moi», dégaine la maire de Lille. «Je suis plus jeune que toi», plaisante Hollande pour qui, cependant, contexte de crise oblige, le choix d’un Premier ministre «n’est pas un arrangement, une combinaison». De fait, à mesure que l’émission avance, l’objectif de Hollande se précise : enfermer Aubry dans le rôle de Première ministre. Technique mais pas politique quand lui s’essaie au parler présidentiel avec ses «grandes causes»et ses «pages d’histoire».
Peut-on vraiment s’attendre à ce que le vaincu du deuxième tour soutienne le vainqueur ? «Dès lundi, nous serons tous unis», assure Aubry, qui entend reprendre son poste de première secrétaire du PS et rappelle qu’à ce titre, c’est elle qui a organisé la «convention d’investiture» du grand pardon, prévue pour le 22 octobre. L’unité, «c’est une évidence et une exigence», confirme Hollande. «Il ne peut pas y avoir de victoire sans unité.»
Thèmes. Le décor est planté, les candidats se cherchent, assis «en triangle» sur le plateau. Ni face à face comme l’aurait aimé Aubry, ni côte à côte comme le souhaitait Hollande. Avant de passer aux quatre thèmes préétablis du débat : économiques, social, politique européenne et internationale et «quelle présidence pour 2012».
David Pujadas met les pieds dans l’actualité socialiste du jour. Ségolène Royal vient d’appeler à voter «massivement» pour Hollande au second tour. «C’est Ségolène, elle rebondit immédiatement», salue Aubry, ni «déçue» ni mauvaise joueuse. Faute d’avoir reçu le soutien de Royal, elle vise ses électeurs : la primaire, «c’est la liberté donnée au peuple de gauche», martèle la candidate. Au tour de Hollande, qui salue les idées portées par son ex-compagne. «Des responsabilités, elle en aura», s’engage-t-il l’air relax.
On entre dans le vif du sujet. «J’ai dit et je le redis, face à une droite dure, il ne faut pas une gauche molle», attaque Aubry. «Je ne sais pas ce que c’est que la gauche dure. Je n’en ai pas envie après cinq ans de présidence brutale.», réplique Hollande. Lui veut une «gauche solide», pas une «gauche sectaire». Un partout la balle au centre.
Inflexion.«Ce n’est pas le débat qui est gênant entre nous, c’est le flou», tape encore la maire de Lille. Notamment sur le non-cumul des mandats, qu’elle soupçonne Hollande ne pas vouloir instaurer. «Je le ferai. Il y aura le vote d’une loi», lance le Corrézien qui interroge : «Puis-je être plus clair ?»«Oui, je le pense», tacle sa rivale : «Je ne change pas mes propositions pour rassembler.»
Sur le «contrat de génération» de Hollande, l’ex-ministre de l’Emploi est formelle : «Tu n’auras pas d’accord, les syndicats sont contre, ça ne marche pas.» Mais sur les 60 000 créations de postes promises par Hollande, Aubry a beau taper du stylo sur sa feuille, elle s’y perd un peu. Pour elle, c’est incompatible avec la réduction du nombre de redoublements qu’il veut. «Ça veut dire qu’on retire par ailleurs des professeurs qu’on veut rajouter», patauge-t-elle.
Ils sont techniques et souvent d’accord. Sur les retraites, Hollande sort de son ambiguïté et approuve la liberté offerte à tous de partir à 60 ans avec décote. Une inflexion qu’elle n’exploite pas jusqu’à l’autoportrait élyséen final. Il veut incarner «une présidence solide, qui puisse être solidaire et respectueuse». Elle revendique aussi la solidité mais pas la même : «On a confiance en moi parce que je ne change pas de position. La solidité c’est aussi la clarté.» Et revient une fois de plus sur son expérience gouvernementale. «Chacun a son expérience et sa clarté, ce sera mesuré dimanche», défie Hollande.
Par MATTHIEU ECOIFFIER, LAURE BRETTON
http://www.liberation.fr/politiques/01012365404
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